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VI




Tout à coup, l’habitude du travail régulier, qu’il semblait avoir prise, s’interrompit. Sa pensée fut distraite de la littérature par la politique, à laquelle il était resté jusqu’alors étranger [1].

Il fut entraîné irrésistiblement dans le mouvement qui allait aboutir à la révolution de Février 1848. Vivant en plein quartier des Ecoles, fréquentant les cafés de la rive gauche, très lié avec quelques écrivains et quelques poètes du parti socialiste, — avec Thoré, Proudhon et Hippolyte Castille notamment, — le jeune poète professa, pendant quelque temps, les idées humanitaires [2].

Pourtant, dans son Salon de 1846, il avait témoigné le plus aristocratique mépris pour le parti républi-

  1. « Au temps où nous errions, ne demandant au verbe que des formes et des couleurs, Baudelaire ne dédaignait pas seulement la politique, il la méprisait ; et nous n’avions, comme lui, que pitié pour l’art inférieur de conduire les hommes. Aussi l’exaltation de mon ami nous surprit-elle beaucoup. » (Notes de M. Prarond.)
  2. Sur les rapports de Baudelaire et de Proudhon, voyez passim, le Charles Baudelaire, Lettres et notamment la lettre à M. E. Rouillon (1865.)