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nimes à attester l’élégance de sa toilette et de sa tenue. L’occasion de décrire, d’après les crayons qu’ils en ont tracés, plusieurs des costumes fashionables du poète, se rencontrera plus loin. Voici le premier en date, que M. Prarond nous fournit :

« Je le vois encore descendre un escalier de la maison Bailly, mince, le cou dégagé, un gilet très long, des manchettes intactes, une légère canne à petite pomme d’or à la main, et d’un pas souple, lent, presque rythmique. »

Malgré son culte pour la toilette, Baudelaire n’était nullement mondain. C’était pour sa satisfaction personnelle qu’il avait ces habitudes d’élégance. Il ne fréquentait guère que ses camarades, car il s’était voué courageusement à ce long apprentissage qui, pour la poésie comme pour tout art ou métier, est la condition inévitable de la maîtrise. Son originalité naissante affectait une forme farouche et truculente, j’emprunte ce mot pittoresque, le seul qui convienne ici au vocabulaire romantique de Petrus Borel, pour lequel Baudelaire avait une dévotion particulière et qu’il imite sensiblement dans le fort étrange poème qu’on va lire, — unique spécimen que nous ayons d’une manière de transition qu’il ne tarda pas à répudier[1]. Aussi faut-il citer la pièce tout entière :

  1. On peut pourtant, sous le rapport du caractère bousingot qui leur est commun, comparer ces stances à un autre poème de Baudelaire qui date de la même époque. Le texte de cette œuvre abracadabrante est, malheureusement, perdu ; il n’en subsiste que le plan, publié dans le recueil des Souvenirs-Correspondances (p. 11-12), par M. Charles Cousin.