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poursuites littéraires. Un événement de mer comme je n’en avais jamais éprouvé dans ma longue vie de marin, dans lecpiel nous pûmes presque toucher la mort du bout du doigt, sans qu’il s’en fût démoralisé pas plus que nous, vint ajouter à son dégoût pour un voyage qui dans ses idées était sans but pour lui, et, quoique continuant à se bien porter, il eut des moments de tristesse dont, malgré le travail que me donnait le soin de conduire un navire démâté, je fis mes efforts pour le distraire dans la crainte des conséquences. Contre mon attente et à mon grand étonnement, notre arrivée à Maurice ne fit qu’augmenter cette tristesse. J’avoue que le besoin de faire tout par moi-même pour hâter nos réparations dans ce port me fit passer tout mon temps dans le chantier de constructions ou chez mes consignataires où je logeais sans avoir pu y conduire M. Beauclelaire, et je ne vis aucun de mes amis nombreux dans un pays que je visite depuis plus de vingt ans, mais à l’hôtel où il était avec d’autres passagers, il n’a formé aucune liaison. Rien dans un pays, dans une société, tout nouveaux pour lui, n’a attiré son attention, ni éveillé la facilité d’observation qu’il possède ; il n’a eu des rapports qu’avec quelques hommes de lettres inconnus dans un pays où elles occupent une place bien petite, et ses idées se sont fixées sur le désir de retourner à Paris le plus tôt possible. Il voulait partir sur le premier navire pour France. Je crus devoir m’y refuser et m’en tenir aux instructions que vous m’aviez données.

» Je reconnus avec lui que je n’avais aucune contrainte à exercer sur lui pour le forcer à me suivre, mission