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Une lettre d’elle, bientôt adressée à M. Ancelle, qui était rentré à Paris, nous renseigne abondamment sur l’état où elle le revit :

« J’arrive à Bruxelles, à l’hôtel du Grand-Miroir. Les médecins ne m’ont pas caché l’état grave où il est, non pour la santé, mais pour la tète : cette tête a trop travaillé, il est fatigué avant Vdge.

» Sans avoir la langue paralysée, il a perdu ta mémoire du son… Xon, quie, quie, les seuls mots qu’il articule, il les crie à tuetète .. H y a ramollissement au cerveau, c’est évident. Quand il n’est pas en colère, il écoute et comprend tout ce qu’on lui dit. Je lui raconte des choses de sa jeunesse, il me comprend, il m’écoute attentivement. Et puis quand il veut répondre, les efforts impuissants qu’il fait pour s’exprimer l’enragent. Les médecins lui voient l’intelligence perdue et veulent que je m’en aille ; ce qui lui fait perdre la raison, c’est de ne pouvoir parler .. Aucun acte extravagant, pas d’hallucinations… Il mange, il dort, il sort en voiture avec Stevens et moi, ou à pied, avec une canne, sur la promenade publique, au soleil (1). Mais, plus de

avec de l’absinthe et produit encore ses plus belles strophes, Murger meurt de tout dans une maison de santé, comme Baudelaire dans ce moment ci. Et aucun de ces écrivains n’est socialiste î

Il est malheureux d’être organisé de la sorte, et ce sont des natures d’élite à qui le même sort est réservé.

De puissants cerveaux échappent à ces tics, mais ils sont trois ou quatre dans la grande famille intellectuelle. Et encore ont-ils tous leur manie ou leur petit vice qui les tue lentement… >) (Lettre du 10 avril 1866, communiquée par M. Maurice Tourneux).

(1) Dans une lettre à Asselineau, qui l’a publiée dans sa Vie, Malassis raconte une promenade qu’il fit faire à son malheureux ami :

« Enfin nous partons. Nous faisons un tour dans la verdure, nous descendons pour déjeuner dans un petit