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édition, il préparaît une préface où il rêvait d’affirmer, avec sa foi dans les privilèges du poète, son « majestueux ; dédain » pour l’ignorance et la fausse pruderie de ses contemporains. Les trois projets que nous avons de cette préface (i), à laquelle il ne renonça que sur les pressantes prières de Malassis, le montrent renchérissant toujours davantage sur ses hautaines ironies. Et, dans Mon cœur mis à nu (XXI s au nombre de divers opuscules qu’il se réservait d’écrire plus tard, il mentionne celui-ci : « Histoire des Fleurs du mai Humiliation par le malentendu, et mon procès. »

Le malentendu, c’est la prétention des juges de rendre un écrivain responsable de ses innocentes fictions. Selon une thèse exposée dans une note célèbre du Reniement de Saint-Pierre, le poète a le droit absolu, il a même le devoir de « façonner, en parfait comédien, son esprit à tous les sophismes et à toutes les corruptions ». D’où cette conclusion logique, que la condamnation du poète, en ce cas, est aussi injuste que serait celle d’un acteur qui, rentré dans la cou. se verrait mettre en jugement pour les crimes du personnage qu’il a représenté.

Mais celle thèse est en contradiction flagrante avec un passage capital d’une lettre, écrite neuf ans plus tard, à sou ami et confident, M. Ancelle (28 février 1866). Parlant de « l’horreur que la France a de la poésie, de la vraie poésie », il en vient aux Fleurs du mal, et tout à coup sa pensée intime, son secret, lui échappe :


(1) V. Œuvres posthumes.