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il n’y a pas de nain qui ne vaille un géant, quand il porte le front haut et qu’il a le sentiment de ses droits de citoyen dans le cœur. »

En revanche, il est difficile de ne pas lui attribuer ces lignes : « Les intelligences ont grandi. Plus de tragédies, plus d’histoire romaine. Ne sommes-nous pas plus grands aujourd’hui que Brutus ?… » C’est exactement la thèse qu’il avait développée dans le chapitre final du Salon de 1846 : De l’héroïsme moderne. On peut encore lui imputer, avec vraisemblance, ce féroce et bizarre entrefilet :


« Que les citoyens ne croient pas aux dames Hermance Lesguilon, aux sieurs Barthélémy, Jean Journet et autres qui chantent la République en vers exécrables. L’empereur Néron avait la louable habitude de faire rassembler dans un cirque tous les mauvais poètes et de les faire fouetter cruellement. »


Après ce court noviciat de journaliste, Baudelaire dut comprendre que l’improvisation quotidienne, avec la banalité de pensée et de style qui en est inséparable, n’était nullement le fait d’un poète amoureux de la perfection ; mais il ressentit toutes les secousses de cette crise politique. Il s’en est expliqué dans ces lignes de son journal, Mon cœur mis à nu : « Mon ivresse de 1848. De quelle nature était cette ivresse ? Goût de la vengeance ; plaisir naturel de la démolition. — Ivresse Littéraire ; souvenir des lectures. »

Il avait accepté, dans leurs extrêmes conséquences, les doctrines révolutionnaires. Je ne puis récuser le témoignage explicite de M. Le Vavasseur, quoique le fait suivant n’ait jamais été imprimé nulle part, et qu’Asselineau lui-même semble l’avoir ignoré :