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Paolo Broggino, auquel j’avais, à mon tour, laissé le soin de tout surveiller pendant que je filais de mon côté. (Haut.) Voilà où nous en sommes !

Cornarino.

Fâcheuse expédition !… C’est alors que pour rentrer dans notre patrie, nous avons dû prendre ces déguisements.

Baptiste.

Monsieur a coupé sa noble barbe et moi, mes humbles moustaches.

Cornarino.

Nous nous sommes établi sur les yeux ces machines noires qui nous font loucher… Louches-tu, toi ?

Baptiste.

Oui, je l’avoue… et ça me gêne. Et enfin, après un voyage plein de péripéties, et dont le détail ennuierait, nous tombons ici avec la nuit.

Cornarino.

Nous hélons ma femme…

Baptiste.

Que notre voix, hélas ! ne réveille pas !

Cornarino.

Qu’allons-nous faire, maintenant ?

Baptiste.

Il peut être imprudent de vous montrer brusquement, comme cela… sans être attendu…

Cornarino.

Qu’est-ce à dire ?…

Baptiste.

Eh ! eh ! j’ai mes idées là-dessus ! Et monsieur sait bien que j’ai toujours blâmé ce mariage-là…

Cornarino.

Monsieur Baptiste ! vous êtes un drôle, et je connais Catarina.

Baptiste, à mi-voix.

Moi aussi !

Cornarino.

Allons !… profitons de la nuit… J’ai sauvé la clef, dans mon désastre… Entrons…

Baptiste.

À la grâce de Dieu ! (Au moment où ils se dirigent vers la porte, entre Amoroso qui, sans les apercevoir, leur en ferme l’accès.)