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Scène VI

Les Mêmes, CATARINA, MALATROMBA.
Catarina, se jette entre Baptiste et Cornarino.

Ah ! je vous en supplie, qui que vous soyez, défendez-moi contre cet homme ! (Malatromba est entré à sa suite, il jette un éclat de rire satanique.)

Cornarino, à part.

C’est ma femme et ne pouvoir…

Malatromba.

Toutes mes précautions sont bien prises ; elle ne peut m’échapper !…

Catarina.

Oui !… Ils vous appartiennent, les misérables ! (À Cornarino et à Baptiste.) Vous êtes hommes, cependant ; peut-être avez-vous eu une mère ? Eh bien ! c’est en son nom que je vous implore ! Je suis Catarina Cornarino, la femme du doge, de votre doge, après tout… Et, celui-ci. (Montrant Malatromba.) Savez-vous ce qu’il médite pendant que mon noble époux se fait battre pour la patrie ? (Second éclat de rire de Malatromba.)

Malatromba.

En vous voyant, belle dame, je suis sûr qu’ils le devinent et qu’ils m’excusent !

Baptiste, à part.

Quelle position pour monsieur !…

Catarina.

Oh ! le monstre ! (Elle prend la main de Cornarino.) Écoute, toi, mon ami ; oui, mon ami ; pourquoi ne serais-tu pas mon ami ? Il faut que tu me défendes… Ah ! il le faut !… ne réponds pas !… c’est inutile !… Il te paye bien, je te payerai mieux… L’argent ! tu aimes l’argent, n’est-ce pas ?… je t’en donnerai et beaucoup ! J’en ai chez moi ! dans un coffre, et des bijoux aussi ; ils sont à toi, tous, tous !… D’ailleurs tu es bon, j’en suis sûre ! (Regardant Cornarino, qui, sous son masque, répond par des sons inarticulés.) Il est idiot. (À Baptiste.) Écoute, toi… tu dois avoir une femme, une mère, une sœur, quelque chose enfin ! ma cause est la tienne, alors, en me défendant, c’est ta femme, ta mère ou ta sœur que tu défends, comprends-tu ! Il est encore plus bête que l’autre… mais, alors,