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même feu sacré pour les srâddhas[1] annuels et pour les sacrifices indispensables, tels que le devoir de mettre le feu au bûcher paternel et l’offrande du gâteau funèbre (pinda)[2], célébrant le même culte, portant le même nom, ayant tout en commun : una domus, communia omnia[3].

Les profits obtenus par chacun des membres de la communauté concourent à enrichir la caisse collective, pourvu qu’ils aient été réalisés avec l’emploi du fonds commun ; ils ne reçoivent pas cette destination et restent la propriété individuelle du communiste, quand celui-ci les a acquis à l’aide d’un talent particulier, sans l’assistance du fonds de ses cohéritiers (Voy. Manou, livre IX, sloca 208). On conçoit, dès lors, que, dans une organisation semblable, la mort d’un des consorts n’affecte en rien la marche ni les intérêts de l’association ; laisse-t-il des enfants ? est-il célibataire ? peu importe ; sa quote-part indivise n’est l’objet d’aucune dévolution : elle est absorbée par la communauté familiale.

XIII. Coutumes et croyances établies en Corée

Les tablettes des aïeux sur l’autel domestique. — D’après la coutume suivie en Corée, le chef de famille doit installer sur l’autel domestique les tablettes commémoratives remontant à quatre générations, c’est-à-dire à son trisaïeul ; à défaut d’une autorisation pour rendre le culte familial au « cinquième » ascendant, il est d’usage que la tablette de cet ancêtre soit inhumée selon les rites funéraires. Cette règle ne s’applique obligatoirement qu’aux fonctionnaires publics ; elle ne concerne point les particuliers, auxquels il est prescrit de n’avoir sur leur autel privé que les tablettes de trois ascendants celles du père, du grand-père et du bisaïeul. La coutume est la même dans l’Inde : « Des libations d’eau doivent être faites pour trois ancêtres, savoir : le père, le grand-père paternel et le bisaïeul ; un gâteau (pinda) doit leur être offert à tous trois. » (Voy. Manou, livre IX, sloca 186.)

La tablette du décédé est une petite planche plate, peinte en blanc, dans laquelle s’incarne l’âme du défunt, et sur laquelle on inscrit son nom en caractères chinois. Au retour des funérailles, la tablette est portée à la maison mortuaire par deux coulys[4] dans une petite chaise fermée : cela s’appelle « Ramener l’âme du défunt. » Pendant les 27 mois[5] que dure le deuil légal prescrit au décès du père, le fils est tenu de faire

  1. Repas fait par le maître de la maison avec du riz, du lait, des racines, des fruits, afin d’attirer sur lui la bienveillance des mânes.
  2. Voy. Manou, IX slocas 137, 138, 186, 187.
  3. Voy. Cicéron, De officiis, I, 17.
  4. Hommes de peine, portefaix.
  5. Comme en Chine.