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dernières lettres.

j’ai reçue ce matin, porte le timbre du 17 novembre, de Tours. Les correspondances de l’étranger sont-elles retenues à Versailles, par les Prussiens ? C’est probable.

J’ai appris avec peine la mort de Mgr Baillargeon. Le Canada perd un de ses meilleurs et plus illustres enfants ; notre famille, un ami des bons comme des mauvais jours. Il a traversé la terre en faisant le bien et il doit posséder maintenant la récompense promise au bon serviteur dont parle l’Évangile.

Les préliminaires de la paix ont été signés, hier, à quatre heures. Les conditions imposées par le vainqueur sont très dures : cession de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine, y compris Metz. Indemnité de guerre : cinq milliards de francs (ce n’est pas officiel). Que peut faire la pauvre France épuisée et perdant son sang par toutes les veines ? Subir la loi du plus fort. Quelle différence entre ces Vandales et les Français qui, après Sébastopol et Solférino, n’ont même pas fait payer les frais de la guerre aux vaincus ! Pour les Allemands, la guerre est surtout une spéculation qui doit rapporter beaucoup de gros sous. Cette paix sera malsaine et la France travaillera vingt ans pour se préparer à la revanche, qui sera terrible.

Nous venons de passer une nuit très agitée. Le bruit s’était répandu, hier, que l’amnistie expirait le soir même, à minuit (ce n’est que ce matin que l’Officiel nous a fait connaître la signature des préliminaires de la paix et la prolongation de l’amnistie pendant quinze