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journal du siège de paris.

Jeudi, 19 janvier. — Temps très doux. Le bombardement est presque nul aujourd’hui. Nous avons d’excellentes nouvelles de l’expédition du général Trochu. On s’est emparé de Montretout, Garches et Buzenval. Sur le boulevard, toutes les figures sont radieuses. On dit que les Français coucheront demain à Versailles et qu’ils donneront la main à l’armée de Faidherbe, qui est à Montléry. Si ce beau rêve se réalise, la position sera sauvée. Je le désire, mais je n’ose l’espérer. Nous avons réellement besoin que notre situation prenne fin. Les prix de tout ce qui se mange atteignent des proportions insensées. Une livre de fromage de Gruyère se vend trente francs ; un poireau vaut deux francs ; une échalote, un franc ; un boisseau de pommes de terre est payé cinquante francs, et un boisseau d’oignons, quatre-vingts francs ; un lapin, soixante francs ; un lièvre, quatre-vingts francs ; une dinde, cent quatrevingt-dix francs ; un canard, quarante francs ; un pigeon, dix-huit francs ; une oie, cent cinquante francs ; une poule, cinquante francs ; pâté de bœuf et porc, cinquante francs la livre ; pâté de cheval, vingt-cinq francs la livre ; le bois se vend douze francs les cent livres ; le charbon ; quinze francs les cent livres.

Vendredi, 20 janvier. — Temps froid. Le bombardement a repris avec beaucoup de vigueur. Notre joie a été de courte durée. Nous apprenons que, dans la soirée d’hier, le général Trochu a dû abandonner toutes les positions conquises dans la matinée. Il a fait des pertes cousidérables, puisqu’il demande un