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journal du siège de paris.

raient fort empêchés de répondre. Gambetta est un avocat du Midi qui vendrait son père pour faire une belle phrase. En 1848, les avocats ont perdu la république ; en 1870, ils perdent non seulement la république, mais encore la France. Depuis le 4 septembre, à Paris seulement, soixante-dix avocats occupent les plus hautes situations dans les ministères, même dans ceux de la guerre et de la marine. Trochu, le gouverneur de Paris, est aussi un fabricant de phrases. Il a une excellente plume de bataille pour confectionner des tartines. On ferait un volume avec les proclamations, ordres du jour, lettres, écrits par lui depuis la chute de l’empire. Aussi l’appelle-t-on le général Trop-lu. D’aucuns pensent que le moindre soldat, avec une bonne épée et non pas avec une plume de Tolède, qui livrerait constamment des combats sous les murs de Paris, afin d’épuiser l’ennemi en détail et de l’empêcher d’aller en province écraser les armées de secours qui ne sont pas encore complètement organisées, ferait beaucoup mieux les affaires de la France que cette espèce de rhéteur botté, éperonné et doré sur tranches, qui trempe son épée dans son encrier. Il commence à m’agacer, ce gouverneur de Paris. On dit que Bazaine est à Wilhemshohe, où se trouvent aussi l’impératrice et les maréchaux Canrobert et Lebœuf. À dater de ce jour, le gaz est rationné. Les cafés, magasins, etc., sont obligés de fermer à sept heures. Ils peuvent rester ouverts jusqu’à minuit à la condition de ne plus brûler de gaz. Dans les maisons particulières, on laisse les