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octave crémazie

« Permettez-moi de vous dire que, dans mon opinion, le Foyer canadien ne réalise pas les promesses de son début. La rédaction manque de variété. Vous avez publié des œuvres remarquables sans doute : les travaux de l’abbé Ferland, le Jean Rivard de Lajoie, votre étude sur le mouvement littéraire en Canada, votre biographie de Garneau peuvent figurer avec honneur dans les grandes revues européennes ; mais on cherche vainement dans votre recueil les noms des jeunes écrivains qui faisaient partie du comité de collaboration formé à la naissance du Foyer. Pourquoi toutes ces voix sont-elles muettes ? Pourquoi Fréchette, Fiset, Lemay, Alfred Garneau n’écrivent-ils pas ? De ces deux derniers, j’ai lu une pièce, peut-être deux, depuis bientôt quatre ans. Il ne m’a pas été donné d’admirer une seule fois dans le Foyer le génie poétique de Fréchette.

« Je reçois ici les journaux de Québec et je vois dans leurs colonnes le sommaire des articles publiés par la Revue canadienne de Montréal. Comment se fait-il donc que presque tous les jeunes littérateurs québecquois écrivent dans cette revue au lieu de donner leurs œuvres à votre recueil ? Est-ce que, par hasard, leurs travaux seraient payés par les éditeurs de Montréal ? J’en doute fort. La métropole commerciale du Canada n’a pas, jusqu’à ce jour, plus que la ville de Champlain, prodigué de fortes sommes pour enrichir les écrivains. Il y a dans ce fait quelque chose d’anormal que je ne puis m’expliquer.