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journal du siège de paris.

avec Jules Favre. Je n’en crois rien. Lundi (hier), le roi Guillaume a passé une grande revue des troupes réunies à Versailles. Les fins politiqueurs prétendent que cette revue annonce une attaque générale sur tous les forts. Moi qui ne suis ni fin ni politiqueur, je ne dis rien et j’attends les événements. Des sentinelles avancées, ayant entendu quelques coups de fusil, ont abandonné leur poste et sont rentrées en fuyant dans Paris. Ce matin, ces fuyards ont été conduits de la place Vendôme à la prison militaire de la rue du Cherche-Midi, au milieu des huées de la population. Ils avaient le képi mis à l’envers, la tunique retournée, les mains liées derrière le dos, et portaient sur la poitrine et sur les épaules deux pancartes sur lesquelles se lisait le mot « Lâche. » Le fameux canonnier de Saint-Denis, qui démolit les batteries à six kilomètres (l½ lieue) et qui a déjà mis quarante-sept canons prussiens hors de service, est un Alsacien, qui s’appelle Christman.

Mercredi, 28 septembre. — Le beau temps continue. Maintenant que l’armée de la Loire marche sur Paris, mieux vaut ne pas avoir les pluies qui étaient l’objet de nos désirs depuis le commencement du siège. Une deuxième estafette est arrivée de Tours. Elle nous apprend que la démarche de Jules Favre auprès de M. de Bismark a gagné toutes les sympathies du continent. L’Europe considère la position des Prussiens comme très aventurée. Par la même voie nous avons la nouvelle de l’entrée des troupes italiennes à Rome,