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journal du siège de paris.

miroitait toujours à nos yeux, mais elle ne devait jamais devenir une réalité. Il vous faut donc, en lisant ces pages, vous mettre à la place des assiégés qui, pendant près de cinq mois, n’ont entendu d’autre musique que celle du canon et de la fusillade, n’ont connu la situation de la province que par les messages emphatiques et mensongers de Gambetta.

Non seulement nous ne connaissions pas ce qui se passait dans les départements, mais nous n’étions même pas renseignés sur les batailles qui se livraient à nos portes : le gouvernement de l’Hôtel de ville nous donnant comme des succès toutes les sorties de l’armée de Paris, à l’exception de l’affaire du 2 décembre, qui a été glorieuse, mais sans résultat, puisqu’il a fallu rentrer dans Paris le 4 au matin. Maintenant que le voile qui nous cachait le véritable état des choses se lève chaque jour davantage, nous pouvons bien dire, avec l’Écriture : Ergo erravimus et ambulavimus in vias falsas. Traduction vulgaire : Nous nous sommes mis le doigt dans l’œil jusqu’au coude.

J’ai fini, hier, de mettre au net mes notes prises au crayon depuis le 19 décembre. Comme j’écrivais après coup, il m’eût été facile de faire le malin en prédisant une foule de choses arrivées depuis. J’ai copié scrupuleusement mes notes sans rien ajouter et sans rien retrancher.

Puissiez-vous y trouver quelque intérêt ! Je suis bien certain que vous n’éprouverez pas autant de plaisir en les lisant, vu le peu de soin de la forme, que j’ai senti