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« Qui passe ainsi sur nos tombeaux ?
« Sont-ils donc revenus ces jours remplis de gloire,
« Ces jours où chaque lutte était une victoire,
« Et chaque soldat un héros.

« Écoutons ! Mais au loin c’est le canon qui gronde.
« Vengeresse du droit et maîtresse du monde,
« La noble France a-t-elle encor
« Sur son front radieux l’auréole invincible
« Qui la fit autrefois si belle et si terrible,
« Dans les grands jours de messidor ?

« Est-ce l’Autrichien au fort de la mêlée,
« Qui fait vibrer sa voix, là-bas, dans la vallée ?
« Hélas ! est-il donc revenu ?
« Chassant ses bataillons dans notre course ardente,
« Pourtant nous l’avons vu, pâlissant d’épouvante,
« Devant nous s’enfuir éperdu.

« Mais les bruits ont cessé ; seul l’écho de la rive
« Apporte à notre oreille une note plaintive
« De pleurs et de soupirs mêlés.
« Qui donc est le vainqueur ? Ah ! Seigneur, si la France
« En ce jour a perdu sa gloire et sa puissance,
« Pourquoi nous avoir réveillés ?

« On dirait que là-bas tout un peuple s’assemble ;
« S’élevant vers le ciel, cent mille voix ensemble
« Prononcent le nom du vainqueur.
« Napoléon ! la France !… Ah ! la vieille patrie
« N’a donc pas encor vu sa puissance amoindrie,
« Ni s’affaiblir son bras vengeur.