Lorsqu’on ne peut plus vivre, il faut savoir mourir,
Et se rendre quand rien ne peut nous secourir.
À quoi me servira votre valeur suprême,
Plus terrible cent fois pour moi que la mort même ?
Tullie est un héros au-dessus du trépas,
Qui viendra se lancer à travers les soldats.
Voulez-vous qu’à mes yeux on égorge ma fille,
Et l’héritier qui peut relever ma famille ?
Et comment osez-vous hasarder vos amis,
Dès que le moindre espoir ne nous est plus permis ?
Dans l’ardeur de tenter une vaine défense,
Les ferez-vous périr pour toute récompense ?
Eh bien, si rien ne peut nous sauver de la mort,
Nous mourrons tous du moins dignes d’un meilleur sort.
C’est parler en soldat, dont l’ardente manie,
Méprise également et la mort et la vie ;
Je suis père, et je dois penser mieux qu’un amant,
Qui ne consulte plus que son emportement.
On n’en veut qu’à moi seul en ce moment funeste :
Faut-il imprudemment sacrifier le reste ?
Mon sang apaisera la fureur des tyrans,
Ah, laissez-lui l’honneur de sauver mes enfants !
Calmez les fiers transports de ce coeur indomptable,
Ma mort est désormais un mal inévitable :
Ma fille, qui n’a plus d’autre soutien que vous,
Aura-t-elle à pleurer son père et son époux ?
Adieu, mon cher Sextus ; adieu, chère Tullie ;
Pour m’aimer plus longtemps, conservez votre vie.
On vient. Ah ! c’en est fait ; dieux, quel moment affreux !
Hélas ! pour ma défense ils se perdront tous deux.
Scène V
Vos amis assemblés sous diverses cohortes,
Pour vous accompagner, sont déjà loin des portes.
Madame, en ce moment, daignez suivre ses pas ;
Du sort de Cicéron ne vous alarmez pas :
Octave qui ne veut que semer l’épouvante,