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défie,
Ne connaît pas encor tout le coeur de Tullie ;
Non, ne lui laissons plus ignorer un secret
Que ma tendre amitié lui cachait à regret ;
Clodomir devenu le fils du grand Pompée
Ne pourra me blâmer de l’avoir détrompée ;
Unissons-les, donnons à César un rival
Dont le nom seul pourra lui devenir fatal ;
Essayons cependant de fléchir un barbare
Pour suspendre les coups que sa main nous prépare ;
Mais s’il veut s’emparer du pouvoir souverain,
À son ambition nous pourrons mettre un frein.
Dieu puissant des Romains, indomptable génie,
Aujourd’hui dieu du meurtre et de la tyrannie,
Si je ne puis changer tes décrets immortels,
Fais-moi du moins mourir aux pieds de tes autels.

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ACTE II


Scène I

Octave, Mécène.
Octave

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 Oui, Mécène, je sais qu’une ardente vengeance
A souvent confondu le crime et l’innocence,
Qu’à des yeux prévenus le mal paraît un bien,
Que la haine est injuste et n’examine rien ;
Mais je sais encor mieux qu’une aveugle clémence
Loin d’arrêter le crime en nourrit la licence ;
Plus on doit épargner les hommes vertueux,
Plus il faut des méchants faire un exemple affreux ;
Quel que soit mon courroux, il est si légitime
Qu’il ne me permet pas le choix d’une victime :
Le seul infortuné digne de mes regrets,
Dont la mort flétrirait à jamais nos décrets
C’est l’orateur fameux pour qui Rome m’implore,
Et qu’un funeste amour me rend plus cher encore,
Le divin Cicéron, dont le nom glorieux
Triomphera toujours dans ces augustes lieux :
Je veux le rendre aux pleurs de l’aimable Tullie