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de compter pour trop ? Est-il bien vrai que vous n’ayez pas trouvé dans sa possession plus de charmes, & que sa conquête ne vous ait pas coûté plus de tems que vous ne me l’avez dit ?

CLITANDRE.

Non, Madame, je vous jure. Le sentiment, le goût & le plaisir ne sont entrés pour rien dans notre affaire ; & ce qu’elle me fait aujourd’hui est d’une injustice affreuse. En arrivant ici, elle m’a signifié avec hauteur qu’elle venoit pour me faire expliquer. Je lui ai répondu avec tout le respect que j’ai pour son sexe, & tout le mépris que peut inspirer sa personne, qu’il ne se pouvoit pas que nous eussions rien à démêler ensemble. Quand elle m’a vu si bien armé contre la dignité, elle est revenue au sentiment, & m’a demandé en grace d’aller cette nuit dans sa chambre, ou de la recevoir dans la mienne, & je l’ai bien cordialement assûrée que je ne ferois ni l’un ni l’autre.