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remment pour une fille d’Opera, mon carosse étoit entré dans sa cour ; & je me préparois à la conduire respectueusement chez elle, lorsqu’elle me dit avec emportement qu’elle ne vouloit pas que je descendisse. Je lui représentai d’abord avec douceur qu’il seroit du dernier ridicule que je ne lui donnasse pas la main ; que ses gens & les miens ne sçauroient qu’en penser ; qu’elle ne pouvoit même me montrer de la colère, sans s’exposer à les instruire de ce qui étoit arrivé ; qu’elle se perdroit par cette indiscrétion ; que je lui étois trop sincérement attaché pour la laisser se livrer à des mouvemens qui pouvoient avoir de si fâcheuses suites ; que d’ailleurs il m’étoit impossible de la quitter, sans lui avoir mille fois demandé pardon à ses genoux, & sans avoir, par mon respect, tâché d’obtenir ma grace. Elle ne me répondit à tout cela qu’en voulant sortir impétueusement du carrosse. Je la retins, & paroissant en fureur à mon tour, je lui dis que je ne souffrirois pas