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LE SOPHA

sa prison par les ordres cruels de Brahma, tous ses efforts ne purent l’en délivrer. Ses élans redoublés, son ardeur, la fureur de ses désirs, échauffèrent apparemment celle de Zéïnis. Mon âme ne s’aperçut pas plutôt de l’impression qu’elle faisait sur la sienne, qu’elle redoubla ses efforts. Elle errait avec plus de vivacité sur les lèvres de Zéïnis, s’élançait avec plus de rapidité, s’y attachait avec plus de feu. Le désordre qui commençait à s’emparer de celle de Zéïnis, augmenta le trouble et les plaisirs de la mienne. Zéïnis soupira, je soupirai ; sa bouche forma quelques paroles mal articulées, une aimable rougeur vint colorer son visage. Le songe le plus flatteur vint enfin égarer ses sens. De doux mouvements succédèrent au calme dans lequel elle était plongée.

— « Oui ! tu m’aimes ! » s’écria-t-elle tendrement.

« Quelques mots, interrompus par les plus tendres soupirs, suivirent ceux-là.

— « Doutes-tu, continua-t-elle, que tu ne sois aimé ? »

« Moins libre encore que Zéïnis, je l’entendais avec transport et n’avais plus la force de lui répondre. Bientôt son âme, aussi confondue que la mienne, s’abandonna toute au feu dont elle était dévorée, un doux frémissement… Ciel ! Que Zéïnis devint belle !

« Mes plaisirs et les siens se dissipèrent par