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LE SOPHA

— Ah ! oui, reprit le Sultan, je n’aurais, par exemple, qu’à… mais n’ayez pas peur ! Continuez, Émir.

— Quelque déconcerté que Mazulhim me parût de son aventure, il me sembla qu’il était encore plus étonné de la façon dont Zéphis la prenait.

— « Si quelque chose peut, lui dit-il, me consoler de cette affreuse disgrâce, c’est de voir qu’elle ne prenne rien sur votre cœur. Que de femmes me détesteraient, si elles avaient autant à se plaindre de moi !

— « Je vous avoue, répondit Zéphis, que je ferais peut-être comme elles, si je pouvais attribuer cet accident à votre froideur ; mais si, comme vous me l’avez dit, et que je le crois, l’amour seul trouble vos sens, je ne trouve dans cette aventure que mille choses plus flatteuses pour moi que tous vos transports. Je vous aime trop pour ne pas croire que vous m’aimiez ; peut-être aussi ai-je trop de vanité, ajouta-t-elle en souriant, pour imaginer qu’il y a de ma faute ; mais quel que soit le motif de mon indulgence, ce qu’il y a de vrai, c’est que je vous pardonne. »

« Pendant que Zéphis parlait, Mazulhim, qui aurait bien voulu lui avoir moins d’obligation, n’épargnait rien de tout ce qui pouvait faire cesser son malheur. Zéphis se prêtait à ses désirs avec une complaisance qu’intérieurement, peut-être, il n’approuvait pas, parce