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LE SOPHA

circonstance qui me faisait rester dans ma prison.

— Voilà bien les femmes ! s’écria le Sultan ; oh oui ! votre réflexion est juste. Eh bien ! je n’en ai rien dit, mais j’aurais parié qu’elle ne disait pas tout. Si je m’en étais vanté, il y a ici des gens qui m’auraient accusé de faire l’esprit fort. Allez, allez, soyez-en certain : ce fut elle qui empêcha que vous ne fussiez délivré.

— La chose, toute probable qu’elle est, répondit Amanzéi, souffre des difficultés ; Moclès, pour un homme jusques alors si irréprochable, me parut avoir bien de l’expérience.

— Ceci change la thèse, dit le Sultan, car… ah oui ! on le voit bien, c’était lui.

— Mais accordez-vous donc, dit la Sultane ; c’était elle, c’était lui : pourquoi, sans se tourmenter tant, ne pas penser que tous deux étaient de mauvaise foi ?

— Vous avez raison ! répliqua le Sultan ; à la rigueur cela se pourrait : il me semble pourtant qu’il serait plus plaisant que ce fût l’un ou l’autre ; je ne sais pas pourquoi, mais je l’aimerais mieux. Voyons toujours ; que dirent-ils après ? Ce n’est pas là ce qui m’intéresse le moins.

— Moclès fut le premier qui revint de son égarement ; il me parut d’abord comme étonné de se trouver entre les bras d’Almaïde, et, sa