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à profit toute la puissance de la presse. Les premiers produits sont séparés comme fournissant le meilleur cidre : ils participent moins du goût des pépins et de la pelure que les derniers. On décharge la presse et on porte le marc au moulin pour être broyé de nouveau avec addition d’eau ; on soumet au pressoir, et le cidre qui en résulte, mis dans des tonneaux, sert, après une fermentation convenable, à la consommation journalière.

Le premier produit, qu’on appelle improprement cidre sans eau, devant être livré au commerce, est l’objet de soins plus attentifs ; on l’introduit dans des tonneaux à larges bondes de six à sept cents litres de capacité ; une vive fermentation ne tarde pas à s’y établir, et il s’opère alors insensiblement une clarification per ascensum que l’on favorise en remplissant complètement les tonneaux, et faisant ainsi écouler les portions de parenchyme très-divisé qui ont été entraînées par le liquide. Pour éviter la déperdition qui s’effectue pendant cette opération, on a dû préalablement placer des baquets plats sous les chantiers qui supportent les pièces. Les écumes réunies, ayant une grande tendance à s’acidifier, peuvent être converties en vinaigre et fournir ainsi un nouveau produit.

Lorsque la fermentation est assez avancée, on soutire le cidre et on l’introduit dans de nouvelles pièces, et, autant que possible, dans des fûts qui ont servi à contenir de l’eau-de-vie.

M.  Payen, auquel plusieurs arts industriels doivent des perfectionnements, a apporté une modification très-importante dans la fabrication du cidre ; elle consiste à mettre à profit plusieurs des ustensiles qui servent à la fabrication du sucre de betterave. Nous extrayons du Dictionnaire technologique les observations suivantes, qu’il y a consignées et qui méritent d’être répandues. Dans les essais qu’il a faits, les pommes, déchirées à la râpe d’Orobel et conséquemment dans un état de division plus grand qu’elles ne le sont au sortir des moulins ordinaires, étaient immédiatement portées a la presse à cylindre. Cette presse, tout en extrayant une grande partie du jus, écrasait encore la pulpe. Le marc, enveloppé dans des sacs de toile, était de suite soumis à l’action d’une forte presse à vis en fer ; on le passait encore deux fois sous la presse à cylindre, en y ajoutant chaque fois 0,2 de son poids d’eau. Enfin on soumettait une dernière fois à l’action de la presse à vis, après l’avoir mélangé avec la même quantité d’eau ; le liquide que l’on en tirait en dernier lieu servait à mélanger au marc d’une opération subséquente. Et déchirant ainsi la pulpe des pommes ou plutôt les cellules dont la chair est fermée, beaucoup plus complètement qu’a l’aide des moyens ordinaires, on extrait une beaucoup plus grande quantité de jus ; on conçoit l’utilité des meilleurs moyens mécaniques, en songeant que le pommes ne contiennent guère en matières solides, pelures, pépins, etc., plus de 4 à 5 centièmes de leur poids.

Par ce procédé, le moût conserve le parfum des pommes, et le cidre qu’il produit est fort et assez alcoolique. Ce mode d’extraction permet aussi, en se servant des chaudières à évaporation, de rapprocher le moût en sirop ; son transport est alors rendu plus facile et plus économique ; il suffit, en effet, d’étendre ce sirop d’eau, ou mieux encore, de jus de pommes très-faible ; pour en faire une boisson rafraîchissante et alimentaire. La fermentation s’établit aussi facilement que si le moût n’avait pas été rapproché.

Lorsque le suc de pommes est trop fade ou trop acide pour produire de bon cidre, on peut y ajouter du sirop ou du sucre de raisin, ou bien encore du sucre de fécule. Nous indiquerons, lorsque nous parlerons de la vinification, le mode généralement suivi pour opérer ce mélange, et les modifications qu’on peut lui faire subir. On doit bien se garder de diminuer son acidité, et surtout, comme on le fait encore trop souvent, au moyen de la litharge ; ce mélange, donnant lieu à la formation du malate de plomb, peut produire du