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On divise les pommes en pommes douces ou à couteau, en pommes acides ou à cuire, et en pommes âpres ou amères : ces dernières, lorsqu’elles sont mêlées dans une proportion convenable avec celles douces, fournissent un cidre qui se conserve très-bien.

Les pommes à couteau forment l’ornement le plus constant de nos desserts ; leur culture est l’objet d’une spéculation assez importante dans les jardins fruitiers des environs de Paris et, en général, des grandes villes. Les soins qu’y donnent quelques horticulteurs ont permis d’obtenir, comme on le verra plus loin, les variétés les plus extraordinaires (voir chapitre V, Fruits monstrueux). Le grand nombre de ces variétés, et l’avantage qu’elles offrent de ne mûrir, pour ainsi dire, que successivement, permet de les présenter sur nos tables pendant toute l’année. Ce fruit, se conserve, d’ailleurs, assez facilement, surtout lorsqu’on le met à l’abri des variations de température (voir chapitre IV, Conservation des fruits pulpeux). La grande quantité d’eau de végétation que les pommes contiennent les rend toutefois assez sensibles à l’action de la gelée, aussi doit-on les en préserver autant que possible. Nous indiquerons bientôt les phénomènes de ce genre d’altération.

Examen chimique. — Les pommes sont généralement composées de chlorophylle résinoïde, — de sucre, — de gomme, — de fibre végétale, — d’albumine ou acide pectique, — de tannin et d’acide gallique, — de chaux — et d’une, grande quantité d’eau. Ces principes varient suivant le degré de maturité du fruit, et quelquefois suivant l’espèce ou la variété. Bien que l’acide malique y soit assez abondant, comme on l’extrait le plus ordinairement du sorbier des oiseleurs, sorbus aucuparia, nous ne nous en occuperons pas ici ; mais nous ne pouvons nous dispenser de signaler les essais qui ont eu pour objet l’extraction du sucre de pomme comme produit d’agriculture manufacturière.

Sucre de pommes.

Lors de la guerre continentale, le besoin, devenu très-impérieux, de remplacer le sucre des colonies par un sucre extrait de nos produits indigènes a fait jeter les yeux sur celui que pourraient fournir les pommes. Plusieurs économistes, et parmi eux les plus célèbres, Parmentier, Proust et Cadet de Vaux, se sont occupés de son extraction. Plus récemment, M. Dubuc père, de Rouen, a retiré de 50 kilogr. de pommes à peu près 42 kilogr. de jus, qui ont produit 6 kilogr. de sucre liquide au prix de 20 à 40 centimes le kilogr. Son procédé consiste à saturer avec de la craie le suc ou moût bouillant extrait des pommes dites d’orange ; il clarifie ensuite au moyen de blancs d’œufs et passe au blanchet après réduction à moitié du volume ; il place ensuite sur un feu doux, et, par une chaleur modérée, l’amène à la consistance de mélasse. Ce sirop à un goût assez agréable.

De nombreuses observations nous ayant prouvé que la coction développe le principe sucré ou favorise sa formation, nous avons modifié le mode d’extraction ci-dessus indiqué, et nous allons en faire connaître le résultat.

Des pommes dites sabot ou reinette blanche ont été cueillies et mises immédiatement dans un four dont on venait de retirer le pain ; après le refroidissement complet, elles étaient mollies et n’offraient aucune trace de carbonisation ; la pellicule ou épicarpe s’en détachait absolument comme celle des pommes de terre cuites sous la cendre, elle offrait même avec celle-ci assez d’analogie. La pulpe, touchée avec la solution aqueuse d’iode, se teintait de bleu, indice de la présence de la fécule ; celle-ci était même, par suite de la déperdition d’humidité, devenue appréciable à la vue simple. La pulpe, broyée dans un mortier de bois et mêlée à suffisante quantité d’eau pour former un magma demi-liquide, fut introduite dans un matras, puis soumise à l’action du bain-marie pour faciliter encore la réac-