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On en fait en Provence un emploi assez considérable pour la coloration du vin muscat rouge.

Ce fruit jouit des mêmes propriétés que la mûre noire, mais à un plus haut degré.

MÛRE, de Virginie, fruit du morus Virginiana ; famille des Urticées.

Le développement de ce fruit offre les particularités suivantes : les chatons mâles et femelles naissent avec les feuilles, ils sont solitaires et pédonculés ; les chatons mâles qui semblaient n’avoir pour fonction que de féconder les chatons femelles tombent immédiatement après l’émission du pollen. Ces derniers se développent et deviennent succulents, ils atteignent généralement quinze à dix-huit lignes de long, s’inclinent par suite de leur pesanteur et deviennent pendants ; ils se colorent et passent du vert jaunâtre au rouge, puis au rouge pourpre et enfin au noir. Ces fruits sont plus hâtifs que ceux du mûrier commun ; ils ont, en outre, un arôme plus suave.

On cultive plusieurs autres espèces de mûrier, qui sont : le mûrier rouge, le mûrier de Constantinople et le mûrier de la Chine ou mûrier à papier ; mais leurs fruits n’offrant que peu ou point d’intérêt, nous nous abstiendrons de les décrire. Parmi les variétés on distingue le mûrier blanc, dont les fruits sont en tout semblables, sauf la couleur, à ceux du mûrier noir ; le mûrier rose, le mûrier grosse reine, le mûrier langue-de-bœuf, le mûrier nain et le mûrier lacinié ; comme elles sont plutôt cultivées pour leurs feuilles, qui servent à la nourriture des vers à soie, que pour leur fruit, nous nous bornerons à les mentionner.

L’une des principales variétés du mûrier blanc, le mûrier multicaule, morus multicaulis, est depuis quelques années très-abondamment cultivé en France ; son acclimatation formera bientôt l’une de ses richesses agricoles les plus importantes.

CERISE, fruit du cerisier, prunus cesarus ; famille des Rosacées, J.

C’est une drupe charnue, arrondie, divisée d’un côté par un sillon longitudinal plus prononcé à la base qu’au sommet. La pellicule ou peau qui la revêt est plus ou moins rouge à l’époque de la maturité et suivant les variétés ; la pulpe est molle, d’un blanc jaunâtre, demi-transparente, d’une saveur généralement assez douce ; elle environne un noyau rond, muni d’une arête latérale qui correspond au sillon tracé sur la peau ; l’amande qu’il renferme est blanche, résistante et légèrement amère, surtout lorsque la pellicule ou épisperme n’en a pas été séparé.

Ce fruit doit son nom à la petite ville de Cerasonte, de la province de Pont, en Natolie ; il fut importé à Rome par Lucullus, vainqueur de Mithridate.


Le sage dans la foule aimait à voir ses mains
Porter le cerisier en triomphe aux Romains.

Roucher.


Ces maîtres du monde, dignes appréciateurs de tous les genres de conquêtes, en connurent bientôt huit espèces ou variétés, une rouge, une noire, une tellement molle qu’on pouvait à peine la transporter, une autre ferme et résistante qui se rapprochait de notre bigarreau, une assez petite et d’une saveur amère, une autre, enfin, dont la tige n’excédait pas deux pieds, et qu’ils appelaient cerise naine. Si l’on en croit Pline, cette variété, lorsqu’on en faisait un usage immodéré, causait des vertiges et enivrait à l’égal du vin. Nous sommes, sous ce rapport, beaucoup plus riches que les Romains, car on n’en compte maintenant pas moins de 50 à 60 tant espèces que variétés. Les progrès presque journaliers que fait l’horticulture permettent de croire que ce nombre augmentera encore : le climat de l’Europe paraît très-approprié à la culture de ce fruit ; ce qu’il y a de certain, c’est que cette partie du monde, la France surtout, possède dans les trois