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plus mal servi de France. Célestine ! Célestine ! Célestine !

La porte de droite s’ouvre lentement. Apparition d’un soldat. — Landhouille se lève effaré.


Scène II

Landhouille, un soldat


Landhouille. — Un soldat dans la cuisine ! Qu’est-ce que vous faites là ?

Un temps. Le soldat va à lui, et, lui tendant sa main ouverte :


Le soldat.

Voici ma main, elle est par le hâle tannée.

Agréez mes souhaits pour la nouvelle année.

Je suis soldat, monsieur, et sauf votre respect,

J’ai nom Léonidas Agathocle Lepet,

Caserné, bâtiment H, à la Pépinière.


Landhouille, étonné. — Asseyez-vous donc, je vous prie.


Les deux hommes s’assoient l’un en face de l’autre, puis, chez Landhouille, le geste qui veut dire : "Vous avez la parole, j’écoute."


Le soldat, souriant.

Je suis le bon ami de votre cuisinière.

C’est moi qui l’aide à laisser brûler le rôti,

En lui faisant l’amour quand vous êtes sorti.

Oui, bien des fois je mis à profit votre absence

Pour cueillir les trésors de sa magnificence

Et remplir, sur l’azur de votre couvre-pied,

Mes devoirs de vaillant et de galant troupier.

Je l’aide également à casser la vaisselle,

A cracher dans la sauce ou dans le vermicelle,

A très bien démantibuler les robinets

De la fontaine, et le machin des cabinets.

J’ajoute que je suis apte à vider les litres,

Que je sais prolonger les fêlures des vitres,

Et, sur l’or des parquets nouvellement frottés,

Faire grincer les clous de mes souliers crottés.

De mes talents, tel est l’énuméré rapide.


Landhouille. — Je ne sais pas à quoi ça tient, je ne saisis pas très clairement le but de votre démarche.


Le soldat.