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qu’il vous chassera de son kiosque !… Parfaitement !… Et avec un fouet ! comme Jésus, à Jérusalem, chassa les marchands du temple. Pourquoi ? Parce qu’imprudemment vous aurez voulu contribuer à l’extension d’un négoce qu’il exerce mais n’accepte pas, et que, créé pour vendre des journaux, il aspire à vendre de l’huile, du vermicelle, des bouchons, en un mot des choses n’offrant aucune parenté, même lointaine, avec la branche d’industrie qu’il a… – remarquez bien ceci – volontairement adoptée !… C’est en vertu de la même loi que nous voyons avec surprise les charbonniers vendre du vin, les merciers vendre de la papeterie, les marchands de couleurs vendre des boutons de portes, des lampes à pétrole et de la poudre à punaises. C’est une chose connue de tout le monde que les garçons de cafés sont professeurs de courses, et je vous mets au défi, sur dix cochers de fiacres, de n’en pas trouver neuf qui soient marchands de chiens… Eh bien, il en est de l’éditeur exactement comme du marchand d’habits : contraints par la force des choses d’acheter, l’un de vieux vêtements, l’autre de la littérature, ils se rencontrent sur ce même terrain : l’idée d’acheter des casseroles !… Ah ! cela est vraiment curieux et l’imbécillité des hommes est amusante vue de tout près ! – Cependant, à la lueur des lampes et sous les lambris des mansardes, des jeunes hommes pleins de talent entassent des feuillets de copie ! Peine perdue ! l’éditeur ne les éditera pas, car son devoir, son rôle, sa tâche, seraient justement de les éditer ! En vain, ils lui démontreront les mérites de leur marchandise ; en vain, comme je ne sais plus quel personnage de je ne sais plus quelle opérette, ils lui corneront aux oreilles :


Voici