sucre, des couvercles de boîtes à cirage, des fers de toupies et des pièces de deux sous. Et quand elle demandait : « Où as-tu donc eu ça ? », l’autre, si audacieusement, répondait : « Est-ce que je sais, moi ! » qu’elle lui tombait inévitablement dessus, conquise à l’impérieux besoin de faire baisser, coûte que coûte, des yeux qui se fichent du monde, de faire taire n’importe à quel prix une bouche qui déclare : « Je mens ». Dix ans plus tard, les choses avaient seulement changé en ce sens que c’était maintenant à Stéphen Hour de demander : « Où as-tu eu ça ? » tandis qu’elle, retour de bordée, se donnait l’irritant plaisir de chantonner en se dandinant : « Je t’en ai trouvé une, de leçon !… Je t’en ai trouvé une, de leçon ! » sans jamais consentir au moindre éclaircissement touchant les gens qui la lui avaient procurée. Car il faut pourtant être juste, il faut restituer à César ce qui appartient à César : elle n’avait que de bons sentiments, cette mignonne. Toujours elle pensait à Hour lorsqu’elle lui faisait des traits, jamais elle ne se créait une relation nouvelle, que son premier mouvement, l’instinctif, ne fût de l’en faire profiter. Elle était comme ces bons noceurs attardés à des soupers de nuit, qui, le bras entré jusqu’au coude en un corsage complaisant, raflent de l’autre main, par la débandade des assiettes, les noisettes et les petits fours qu’ils rapporteront à Madame. Voilà. Et elle trouvait aussi des paires de gants, des bas brodés, des souliers neufs, des choses qui la faisaient belle, quoi !… poussées sur elle comme des champignons, par l’intervention du Saint-Esprit.
Donc, cette fois encore, elle avait eu la main heureuse.
Double trouvaille !… Pour elle, un chapeau canotier qui égayait, jusqu’à la rendre délicieuse, sa laideur de vaurienne futée, lui faisait une frimousse à en mourir de rire ; pour lui,