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La façon dont je hurlai : « Non ! », avec un geste qui sabra le vide, équivalait à un arrêt. Lamerlette n’insista pas. Sur la table débarrassée je juchai un moulage en plâtre du Discobole dont je me disposai à faire une étude peinte, et pendant un instant on n’entendit plus rien que le grincement aigre du fusain sur le grain de la toile tendue.

— Maudruc, mets ta pendule au clou, dit soudain Lamerlette qui me regardait faire, en me fumant sa pipe dans le dos.

— Tu m’embêtes, répondis-je, je t’ai déjà dit non.

Il souffla une bouffée de fumée et continua :

— Mets-la donc au clou, ta pendule.

— Zut !

Impassible, il me dit :

— Tu ne veux pas l’y mettre ?

Du coup, je me bornai à hausser les épaules, déterminé à ne plus répondre, mais lui, froidement, prit une chaise, et vingt minutes durant, sans qu’une seule fois il s’interrompît pour reprendre haleine, il me persécuta, m’obséda, me larda de la même phrase sempiternellement rabâchée et marmottée à mon oreille en lamentable faux bourdon :

— Maudruc, mets ta pendule au clou ! Maudruc, mets ta pendule au clou ! Mets ta pendule au clou, Maudruc ! Dis, mets-la au clou, ta pendule ! Hé, Maudruc ! Maudruc, mets ta pendule au clou !

Même il s’embrouillait à la fin, m’appelait Maudrou, puis Maudrule :

— Mets ta pendule au trou, Maudrule ! Mets-la donc au truc, ta pendrou !

C’était à en devenir enragé. Je dus me rendre.