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variés qui sont les plus jolis du monde et qui vous iraient comme des gants. Je vous les céderais pour un morceau de pain, histoire de vous rendre service.

Tout de suite ce fut affaire faite. Zackmeyer se chargea nos toiles sur les épaules et nous le suivîmes à sa boutique, où nous choisîmes deux costumes, de singes, je crois, ou de mousquetaires ; deux ignominies en tout cas, deux saletés rongées de vermine et d’usure qui valaient bien trente sous la paire et qu’il nous vendit vingt francs pièce. Encore jura-t-il hautement qu’il s’imposait un sacrifice et que nous serions des sans-cœur si nous ne lui payions le vermouth. Quel vieux filou ! Nous le lui payâmes, cependant, enchantés de notre acquisition et tout à l’idée du plaisir que nous procurerait le lendemain.

II

Ce même lendemain, à huit heures, un coup de sonnette me mit sur pied.

Je me vêtis, en prenant soin de ne pas éveiller Lamerlette (car le lit nous était commun, comme tout le reste), et je me trouvai, ayant ouvert, en présence d’un garçon de recettes qui demandait :

— Monsieur Maudruc ?

— Monsieur Maudruc, dis-je, c’est moi.

Il continua :

— Je viens pour toucher un effet.

— Un effet !

— Oui, monsieur ; un effet de vingt-cinq francs.

— Eh ! il y a méprise ! m’écriai-je ; je n’ai souscrit d’effet à personne. Voulez-vous me permettre de voir ?