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volupté ! il les fallait entendre, ses soupirs ! des soupirs longs comme des angoisses et profonds comme des tombeaux, où s’évoquaient avec un égal bonheur, tantôt le tendre émoi de la vierge au contact du premier baiser, tantôt, en rauquements farouches, les accouplements formidables des Césatosaurus, Diplodocus, Tricératops, Iguanodons et autres mastodontes antédiluviens au fond des obscures cavernes !…

— Très bien ! Bravo ! cria Hamiet tandis que le compositeur achevait d’exhaler sa grande âme dans un trémolo prolongé secouant ses mains d’une crise de delirium tremens. Vous aviez raison, Cozal ; voilà un homme extraordinaire.

Il s’amusait bien un peu ; pas tant, toutefois, que le jeune homme l’eût pu croire, car il voyait des atouts dans son jeu à force de les y souhaiter, et à travers la charge énorme que Hour dessinait de soi-même, il apercevait le musicien, le personnage de qui la verve pouvait – devait ! – contribuer dans une proportion x à l’heureuse issue de son projet. Et soudain le souvenir lui revint à l’esprit des talents de la jeune Hélène. Alors, s’étant tourné vers elle :

— À propos, mademoiselle ; et vous ?

— Moi ? questionna Hélène surprise.

— Oui, vous, la belle étonnée ! Nous savons aussi de vos histoires.

— Quelles histoires ?

— C’est bon, reprit Hamiet ; inutile de vous faire les yeux plus grands que le bon Dieu ne l’a voulu. Grimpez-moi plutôt sur cette table et montrez-nous un peu à quoi vous êtes bonne, que je voie si l’ami Cozal n’a pas abusé de ma candeur.

Il riait. De la main, en même temps, il apaisait Stéphen Hour qui, littéralement, aboyait aux jupes de sa douce