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un bain de sirop de sucre. Voilà vos deux francs, mon petit chat.

Félicie.

Ça ne vous gêne pas ?

Des Rillettes.

Non.

Félicie.

Alors… merci, monsieur.

Des Rillettes, très grand seigneur.

Laissez donc !… Jamais je n’ai moins regretté mon argent. Salut ! demeure calme et tranquille, asile de paix où je me propose de venir trois fois par semaine passer la soirée cet hiver, les pieds chauffés à des brasiers qui ne me coûteront que la fatigue de leur présenter mes semelles, et abreuvé de tasses de thé qui ne me coûteront que la peine de les boire. Oh ! agréable perspective ! rêve longtemps caressé ! vision cent fois douce à l’âme du pauvre pique-assiette qui, sentant la vieillesse prochaine et pensant avec Racan que l’instant est venu de faire la retraite, ne demande pas mieux que de la faire, à l’œil, sous le toit hospitalier d’autrui. (Cependant, depuis un instant, Félicie agacée mime le coup de rasoir, la joue caressée du revers de la main et le bout du nez pincé entre l’index et le pouce.)

Des Rillettes, se tournant vers elle qui interrompt brusquement sa mimique.

C’est que voyez-vous, mon enfant, plus on avance dans la vie, plus on en voit l’inanité. Qu’est la vo-