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de balai chassant en éventail l’ordure du pavé. La Guillaumette tenait sa droite, Croquebol tenait sa gauche, et ils avançaient par saccades, avec d’étranges sautillements de crapauds hémiplégiques. Ils avaient l’air de deux messieurs que l’appel d’une affaire prodigieusement urgente met dans la dure nécessité de faire leurs besoins en marchant. Le temps passait. Cinq heures sonnèrent, puis six heures. De temps en temps, La Guillaumette sans lever le nez criait au copain :

— Eh ben, vieux ?

L’autre, mélancolique, répondait :

— Rien de nouveau !

C’était tout. Le soleil maintenant leur rôtissait les reins, séchait sur eux leurs dolmans détrempés, les leur durcissait sur la peau en cassures aiguës de carton-pâte. Et petit à petit, de leurs bras, de leurs jambes, de leurs épaules arrondies, de leurs larges derrières tendus, une évaporation se dégageait ; poètes, ils allaient dans un nuage, promenaient avec