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Aussi bien, avec vous, je veux être sincère ;
Une explication qui devient nécessaire
Me contraint à vous dire en bonne vérité
Que vous marchez tout droit vers l’importunité.
Votre ombrageux amour, trop prompt à la querelle,
Change de plus en plus Clitandre en Sganarelle,
Philinte. Sur ce point, qu’il daigne ouvrir les yeux.
Le mien n’y risque rien, que de s’en porter mieux.

Philinte

Qu’Alceste, au temps jadis, sut bien…

Célimène

Qu’Alceste, au temps jadis, sut bien…En cette affaire
Je conçois assez mal ce qu’Alceste vient faire.
Je vous trouve plaisant, mon cher, quand vous venez
Me bailler froidement de ce nom par le nez.
Osez donc, s’il vous plaît, me regarder sans rire,
Et m’épargner des mots inutiles à dire.

Philinte

Le pauvre homme !

Célimène

pauvre hommePlaît-il ?… Vous avez dit ? Comment ?…
Le pauvre homme ?… Ouais ! le mot part d’un bon sentiment !
À « Pauvre homme », sans doute, il faut rendre les armes,
Et ce pauvre « Pauvre homme » attendrit jusqu’aux larmes.
Tout au plus, j’oserai vous demander pourquoi
Vous prenez, en parlant, l’air de parler pour moi.
Alceste, de vos soins, eut sa part, ce me semble,
Et nous l’avons un peu sacré « Pauvre homme » ensemble.
Modérez donc l’ardeur d’un si noble courroux.

(Un petit temps.)

Est-ce que, par hasard, j’ai commencé sans vous ?

(Mouvement de Philinte.)

Eh ! quelle rage, aussi de me prendre pour cible ?
Qu’ai-je donc fait, mon Dieu, de si répréhensible ?
Pourquoi ces airs de dogue et ce ton irrité ?
Je ne vous comprends pas, Philinte, en vérité.
On croirait qu’avec vous en couchant côte à côte
J’aurais fait quelque mal et commis quelque faute.

Philinte, stupéfait.

Pourtant vos torts…