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LA LIGNE DES HESPÉRIDES

élève de Polytechnique, j’étudiais avec acharnement pour conquérir mes grades et me sauver de l’existence précaire où des entreprises de grande envergure, subitement naufragées, avaient réduit ma famille.

En sortant de l’Université, Reynaud s’était fait inscrire au barreau en même temps que j’obtenais une place d’ingénieur dans une grande compagnie. Mais le jeune avocat, épris de littérature, délaissa bien vite le Palais pour écrire dans les journaux. Il avait d’emblée choisi son genre : l’ironie, le paradoxe, la blague. Hors de là, selon son propre aveu, il ne valait rien.

Un jour que je lui conseillais d’occuper parfois sa plume à des pages sérieuses, il me répondit gaîment comme le noir Iago : « Hélas, mon cher, tu oublies que je ne suis rien quand je ne raille pas ».

Il fantasiait sur tout, mais principalement sur l’amour. Il était impitoyable