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LA LIGNE DES HESPÉRIDES

faisait craindre pour sa raison. Je n’eusse pas osé le quitter à cette minute ; je lisais dans ses yeux la tentation d’un acte violent contre lui-même…

Il exhala un soupir :

— Cette sonate. Elle l’a si souvent jouée pour moi ! Pour moi seul !

En même temps, il soulevait une breloque d’or suspendue à la chaîne de sa montre. C’était un médaillon à secret qu’Elle lui avait donné jadis au moment de la séparation. Il l’ouvrit en pressant un ressort et s’absorba dans la contemplation de cette relique qui renfermait une image pâlie par ses yeux, encore plus que par l’ardent soleil des tropiques, tant il l’avait regardée !

Soudain, il détourna la tête et fondit en larmes. La détente enfin. C’était la première fois que je le voyais pleurer, la première fois qu’il pleurait à cause d’elle. Une pudeur farouche avait constamment tenu ses yeux secs, même aux plus cruelles heures d’amertume.