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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

soins que nécessitait la mauvaise santé de sa mère, devenue presque aveugle à la suite d’un accident, les avaient obligées de venir habiter Bruxelles où les conditions de la vie étaient moins onéreuses.

— Et c’est là tout, disait-elle. Depuis tantôt six mois, nous demeurons dans une tranquille maison de Woluwe. C’est presque la campagne ; nous nous y plaisons beaucoup ; nos voisins sont obligeants ; nous ne sommes pas malheureuses…

Il ne doutait pas de la sincérité de ce récit, un peu sommaire et qui manquait de précisions. Il ne s’étonnait pas du vague de ces confidences. Aucune objection ne lui montait aux lèvres. Il était tout à l’enivrement de son amour et ne réfléchissait à rien d’autre. Elle était adorable ; ses yeux passionnément noirs, ses bras qui transparaissaient sous les manches de foulard, le dessin de ses genoux moulés par la tension de la jupe et, plus que tout le reste, cette effluence capiteuse, faite d’une odeur très fine mêlée au parfum de sa chair, qui montait de son corsage croisé en fichu, le grisait d’un désir qui devenait chaque jour plus impatient et aspirait à la félicité suprême.

— Et l’examen ? demandait-elle parfois. J’espère que tu travailles… en pensant à moi !

En vérité, ses cahiers et ses livres lui étaient devenus assez indifférents. À peine s’il les feuilletait encore à ces rares moments où la pensée du proche examen parvenait à le sortir de son rêve.