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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

est vrai qu’il « s’en fichait pas mal », comme il le proclamait hautement. C’était assurément un soldat peu exemplaire. Bien souvent, dans la chambrée, Hippolyte, à bout de patience, l’avait adjuré de faire moins de bruit et de laisser reposer ses camarades. Mais le loustic restait sourd à cette prière, redoublant de tapage, multipliant ses quolibets.

Or, il arriva qu’un dimanche soir, Lauwers, qui était rentré à la caserne plus excité qu’à l’ordinaire, se mit à bourrer son voisin de lit déjà plongé dans le prima quies.

Le dormeur, un garçon d’apparence malingre et d’esprit simplet, s’était dressé sur son séant.

— Allons debout, commandait Lauwers, le moment est venu de payer ta dette à la Société !

Terrifié, le petit soldat s’enfonçait les poings dans les yeux, cherchant à s’y reconnaître.

— J’espère que tu auras du courage, poursuivit l’impitoyable farceur. Debout, te dis-je, Deibler attend !

Des rires étouffés fusaient sous les couvertures de la chambrée. Mais la pauvre victime tremblait de tous ses membres et ne sortait pas de l’affreux cauchemar.

Soudain, Lauwers empoigna le condamné à bras-le-corps. Mais, comme il tentait de le soulever, une main fine se posa sur son épaule.

— En voilà assez ! dit Hippolyte. Je vous prie de laisser ce garçon tranquille.

Alors, Lauwers, sans lâcher son prisonnier :

— Ah ça, qu’est-ce qui vous prend, Monsieur