Page:Courouble - Le roman d'Hippolyte (La famille Kaekebroeck), 1927.djvu/300

Cette page a été validée par deux contributeurs.
298
LE ROMAN D’HIPPOLYTE

— Ah, s’écria-t-il tout à coup, j’ai du courage, certes, mais tant de chagrin !

C’était surtout le départ de Michel qui l’avait désespéré et ne cessait de lui faire un vide immense. Thérèse essayait de calmer sa peine :

— Rassure-toi, ton camarade est à Folkestone et se remet lentement. On le guérira…

Et après une légère hésitation :

— Sa sœur me l’écrivait encore dernièrement…

Elle s’attendait à quelque émotion de sa part à l’évocation de miss Suzy, mais il ne broncha pas :

— Oui, répondit-il simplement, mon frère Émile, qui a dû s’installer en Hollande pour les affaires de sa société, me tient au courant… Michel se rétablira sans doute, mais sa carrière militaire est finie. J’en suis heureux pour lui — et plus que lui, bien sûr, car c’est un brave — mais comme je le déplore pour moi !

La jeune femme ne laissait pas d’être surprise du calme qu’il avait montré en l’entendant parler de Mlle Lauwers. Se pouvait-il que le souvenir de la jeune fille se fût si vite effacé de son cœur ? Elle le plaignait de ce grand amour malheureux tout en éprouvant une aise secrète à le supposer complètement guéri de sa blessure. Elle n’avait plus de raison de souffrir de cette jalousie si tendre, si cachée… N’était-il pas redevenu son cher garçon d’autrefois quand les hasards de la vie n’avaient pas encore jeté sur sa route la belle enchanteresse, cette Hania à l’âme haute, généreuse, si digne d’être aimée…