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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

Et il s’éloigna avec la Vonette triomphante, accrochée à son coude.

Le jeune homme avait admirablement dormi. Sa figure ne semblait plus aussi hâve ; ses yeux avaient perdu leur profonde cernure et cette expression hagarde qu’une insurmontable fatigue leur donnait la veille. Il était fraîchement rasé et sa moustache brune, un peu plus épaisse maintenant, faisait ressortir avec un grand charme une bouche petite, joliment arquée et vermeille.

Avec l’aide adroite de Thérèse et le précieux naphte, sa capote, dont il n’avait pas voulu se séparer par obéissance aux ordres militaires, s’était subitement rafraîchie et devenait « très présentable », en dépit d’un rapiéçage un peu sommaire, hardi à de certaines places. Mais que lui importait d’être ainsi « ficelé », pourvu que son linge fût frais et qu’il se sentît par dessous la peau nette, irréprochable !

La journée était splendide et la mer chantait doucement. À pleins poumons, il aspirait la salure de l’air et un bien-aise infini lui pénétrait dans tout le corps et jusqu’au fond de l’âme. La fillette, cramponnée à son bras, se haussait tant qu’elle pouvait sur ses pieds nus, tendant vers lui des yeux chargés d’une tendresse presque amoureuse :

— Parrain, comme j’étais triste que tu n’arrivais pas ! Pourquoi est-ce que tu n’es pas venu plus tôt ?