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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

— Voyons, tu ne dois pas être triste, fit-elle en l’embrassant. Papa ne restera pas longtemps en voyage. Il reviendra bientôt et nous irons tous ensemble le chercher à la gare. Hein, ce sera très gai !

Mais ce n’était pas l’absence du cordier qui affligeait la fillette. Elle resserra l’étreinte de son bras et, tout contre la joue de sa mère :

— Sais-tu pourquoi je suis si triste ? C’est parce que parrain ne vient pas comme les autres années… Il avait bien promis pourtant…

Très émue, la jeune femme songeait au pauvre soldat chez qui les fatigues et les amertumes de la retraite annihilaient bien sûr en ce moment le souvenir de sa filleule et celui de sa tendre amie. La question d’Yvonne ravivait brusquement une inquiétude que les vociférations des crieurs d’éditions spéciales, lâchés sur la plage, transformaient en une sourde angoisse.

Cependant, Vonette attendait une réponse :

— Parrain a promis, dit-elle, alors il viendra.

Mais Thérèse ne voulait pas que la petite s’entêtât dans un vain espoir :

— Écoute, ma chérie… Ton parrain est un brave soldat qui fait son devoir. Il est à la guerre avec ses camarades et n’a pas le temps de venir nous voir, tu comprends…

Elle était oppressée. Sa voix s’étranglait dans sa gorge et des larmes perlaient au bord de ses yeux. Elle pressa tout à coup l’enfant sur son cœur et dans une crise de désolation :

— Oh, comme je suis triste, moi aussi ! Un