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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

ner, à griller des cigarettes, à « nocer » avec de petites dames !

Allons, le patriotisme n’était pas un sentiment tiède… Non, la prospérité ne nous avait pas avilis. La guerre réveillait tout à coup les ardeurs endormies. Jusqu’à la garde civique qui s’était réhabilitée du ridicule. Si elle avait eu ses grotesques, comme toujours, elle comptait maintenant quelques vrais héros…

Rampelbergh lui-même, que Joseph avait justement rencontré cet après-midi, Rampelbergh, l’éternel vilipendeur de la « milice citoyenne », lui avait parlé avec éloge des jeunes gardes du quartier qui n’avaient pas hésité, après leur licenciement, à s’enrôler dans l’armée régulière ; il est vrai que l’occasion lui était bonne d’exercer sa verve aux dépens des gradés qui avaient déposé les armes, surtout contre le farouche Mannebach qui, le premier de tous, avait couru remettre son épée à la commandantur !

Joseph ne voyait plus le droguiste que de loin en loin ; il le regrettait, car le vieux paillard n’était pas morose et prenait l’occupation du bon côté. En effet, Rampelbergh ne s’irritait pas contre les choses parce qu’il était bien persuadé, comme le sage, que les choses s’en moquent et que cela ne leur fait absolument rien du tout. C’est ainsi qu’il ne maugréait pas trop d’être chassé de son Château d’Or dès 9 heures du soir, malgré l’horreur de tout ce qui l’obligeait à sortir de ses habitudes. Cette fermeture des estaminets, à une heure aussi peu avancée, lui