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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

un crasseux porte-monnaie pour faire l’aumône à une vieille femme qui avait vraiment l’air d’une malheureuse :

— Eh bien, on dira ce qu’on veut, ça m’a fait quelque chose…

Mais Hermance, raidie dans son mépris, ne voulait pas s’émouvoir :

— Oh, il n’est pas interdit à quelques-uns d’avoir bon cœur en passant… Malgré tout, je reste sceptique : ton soldat ne donnait pas par pitié mais pour que cela lui portât bonheur !

— Oui, ricanait Joseph, ce n’est pas la charité qu’il faisait, c’était de l’usure !

Sur le chapitre « provisions », on pense que les femmes avaient beaucoup à dire, principalement Adolphine qui, en ménagère prévoyante, et dès l’invasion, avait accumulé dans ses caves des conserves de tous genres. Joseph essayait de l’effrayer :

— C’est fort bien, approuvait-il, mais si les scélérats s’avisaient un jour de nous voler toutes ces richesses…

— Ça je voudrais un peu voir !

Elle en devenait toute rouge d’indignation, sentait frémir en elle une âme farouche d’amazone. N’empêche qu’elle n’était pas plus rassurée que cela et demeurait un instant toute pensive, occupée à découvrir des resserres inviolables.