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XVII


Comme on redoutait pour Mme Platbrood la solitude des longues veillées, les trois ménages se retrouvaient presque tous les soirs rue des Chartreux. Du reste, la proximité de leurs demeures respectives et la juste confiance qu’inspiraient des bonnes très dévouées aux enfants, leur permettaient de s’absenter sans inquiétude. C’est ainsi que la maison paternelle était devenue une sorte de parloir où l’on échangeait force impressions sur les événements du jour, les faits et gestes des Bruxellois et de la garnison teutonne qui déambulait par la ville.

Joseph était un optimiste que rien ne pouvait abattre ; il opposait aux informations fâcheuses un esprit invulnérable, promenant dans la rue un visage de bois, refrénant ses bouffées de colère de peur d’ajouter à la joie des tyrans. Il se vantait de ne pas lire « leurs » affiches et frémissait d’impatience à la vue des badauds arrêtés devant cette éruption d’ordonnances, d’avis, de bulletins de victoire et capables d’absorber cette prose stupidement fanfaronne sans que leur sang ne fît qu’un tour.

— Oui, grinçait-il, il y a quelque chose qui me fâche encore davantage que leurs placards