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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

nation contre cette barrière mouvante qui l’empêchait de passer.

— Patience, patience ! mâchonnait-il pour lui-même, de par tous les dieux et diables, ceux-là ne reviendront pas !

Soudain, au mépris de la police, il profita d’un intervalle pour traverser et s’enfuit par la rue du Marais tandis que le fleuve d’hommes continuait à couler d’un flot lent et gras, telle une lourde purée grise vomie, comme une lave infecte, du volcan de la guerre…

Ce soir-là, après le dîner, il ne put résister au désir de se mêler au populaire. Adolphine le conjurait, le suppliait de rester à la maison par crainte des bagarres ; puis, voyant qu’elle ne le persuaderait pas, elle se décida à l’accompagner plutôt que d’avoir à souffrir les angoisses de l’attente.

Après une courte visite rue des Chartreux pour rassurer les parents Platbrood, ils gagnèrent la Bourse devant laquelle stationnaient des groupes très denses que la police s’efforçait en vain de disperser. Du reste, cette foule ne montrait rien d’hostile ; il semblait qu’elle éprouvait encore l’inertie de la stupeur, ouvrant de grands yeux, commentant à mi-voix l’occupation du monument par les bataillons qui allaient y passer la nuit.