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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

milieu des dangers. Le baptême du feu, en avant de Liège, l’avait aguerri au métier. Quoiqu’il ne se fût jamais cru poltron, encore ignorait-il ce que le premier combat réservait de surprise à ses nerfs. Le danger, à la tête de Gorgone, ne l’avait pas pétrifié. Maintenant, il ne doutait plus de son courage.

C’est lui qui s’offrait le premier pour occuper un poste avancé et découvert, remplir quelque périlleuse mission d’éclaireur. On le vit porter secours à des camarades en détresse, aider les brancardiers sur le champ de bataille au mépris de la fusillade qui n’épargnait guère les brassards blancs.

Rien ne lui semblait trop dur ni au-dessus de ses forces. Au bout de quelque temps, ce raffiné ne souffrit plus d’être privé de son tub, de ne pouvoir se débarbouiller autant qu’il voulait ; il lui suffisait d’escompter patiemment la chance de se laver demain, un de ces jours, dans l’eau crue du ruisseau. La nourriture ne lui causait plus de répugnance ; il s’accommodait de ces grosses soupes dans la gamelle, mangées debout à des heures imprévues, des soupes qui ressemblaient parfois à des pitances de dogue et dont sa faim était le seul assaisonnement. Tant pis pour ses aises ; il les oubliait. La botte de paille dans la grange ne lui était pas un matelas si dur qu’elle l’empêchât de dormir le beau sommeil des vingt ans. Il éprouvait une sorte d’orgueil à dédaigner le confortable, à vivre à la belle étoile comme le trappeur. Une coquetterie