Page:Courouble - Le roman d'Hippolyte (La famille Kaekebroeck), 1927.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.
18
LE ROMAN D’HIPPOLYTE

Il avait renoncé à ses petites flâneries quotidiennes et vivait en reclus, penché sur des manuscrits et des in-folio, comme un moine du mont Cassin.

C’était un grand effort ; le jeune homme passait par des alternatives de découragement et d’espoir. Tantôt, il ne savait plus rien : son cerveau s’était comme vidé d’un coup de toute la science qu’il y avait logée avec tant d’ordre et de méthode. Puis voilà que sa mémoire, subitement réveillée, projetait une vive lumière sur l’ensemble des matières qu’il embrassait à présent d’un regard et percevait jusque dans leurs infimes détails. Cette fois, réconforté et abjurant ses craintes, il se promettait de ne plus désespérer ; mais bientôt, tout l’inconnu de cette première épreuve redoutable le plongeait dans de nouvelles transes qui énervaient sa volonté et le hantaient jusque dans son sommeil.

Aussi, avait-il beaucoup maigri ; une fièvre brûlait ses yeux et amenuisait son visage. La bonne Mme Platbrood s’alarmait de ce surmenage, d’autant plus que le 1er août prochain, c’est-à-dire quelques jours seulement après la session d’examens, Hippolyte devait entrer à la caserne du Petit-Château pour commencer son service militaire. Rien de plus contrariant : c’est à peine si le pauvre garçon aurait le temps de se reposer. Elle le sermonnait doucement :

— Voyons, fils, tu n’es pas raisonnable. Il faut prendre un peu l’air… Tu vas tomber malade et alors on sera bien avancé !