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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

préoccupations universitaires. Car elle se fût bien gardée de faire la moindre allusion à sa fatale tristesse. Mais l’égoïste Ferdinand, entêté dans sa maussaderie, ne demandait qu’à partir. Il fit un signe à Thérèse et, profitant de la rentrée d’Hermance et des sollicitations qu’on lui adressait pour qu’elle se mît au piano, ils disparurent tous deux avec les grands-parents Platbrood, sans attirer l’attention de personne.

Après que Mme Dujardin eût joué une sonate de Mozart, on pria Mlle Lauwers de « se dévouer » à son tour. La jeune fille se défendit de rivaliser avec une virtuose comme Hermance ; elle n’était pas exécutante et se contentait de déchiffrer. Mais si l’on voulait bien, elle chanterait quelques vieilles ballades anglaises…

— Oeie oui, s’écria Adolphine, ça c’est une bonne idée !

La jeune fille n’avait pas une voix très étendue, mais elle la conduisait avec beaucoup de charme. Parmi ces vieux songs, elle choisit d’abord le plus âpre et qui traduisait les sentiments d’une âme douloureuse. Puis, elle chanta une cantilène très douce, sorte de plainte apaisée dont l’accompagnement imitait le flûteau du merle après l’orage. Soudain, elle entonna un refrain d’allégresse, effusion d’un cœur reconquis à l’espérance et qui entrevoit le bonheur…

Cette petite trilogie sentimentale obtint le plus vif succès. Comme la chanteuse regagnait sa place, au milieu des applaudissements, un regard magnétique l’obligea à se retourner.