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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

Amy Robsart. C’est une noble femme. Et tenez, voici comment je me la figure au physique…

Comme par hasard, l’héroïne ressemblait à sa panégyriste. La jeune fille ne doutait pas qu’il ne mit un brin de malice dans ce portrait, et pourtant il y avait dans l’accent et les yeux d’Hippolyte une telle sincérité joyeuse qu’elle en était toute remuée.

— Vraiment, dit-elle un peu confuse, vous n’êtes pas bien exigeant en fait d’esthétique féminine. Il me semble que l’Amy que vous décrivez est bien au-dessous du type de Walter Scott !

— C’est pourtant ainsi que je la vois, fit-il sérieusement. Je ne voudrais pas qu’elle fût autre. Ce serait une grande déception…

Ses yeux, en la regardant, avaient une expression de douceur, de tendresse contenue et grave qui fixait peut-être le sens des paroles obscures. Un peu de pourpre avait sauté aux joues de la jeune fille. Bien que, par caractère et par éducation, elle ne fut guère encline à la sentimentalité, elle était troublée et tentait en vain d’échapper au charme de ce premier aveu enveloppé dans les formes timides du sous-entendu.

Son gracieux visage avait perdu toute sa mobilité joyeuse. Alors, à bout de discrétion et d’indifférence feinte pour une tristesse dont elle savait le secret, elle leva sur Hippolyte ses grands yeux pensifs et murmura :

— Est-ce donc vrai que vous n’avez plus autant de chagrin ?…